Le piège des devoirs : cette erreur que 80% des parents font sans s’en rendre compte

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Les devoirs sont depuis toujours source de tensions dans les familles.

Entre un enfant qui traîne des pieds et des parents qui s’arrachent les cheveux, les fins de journée tournent parfois au cauchemar.

Une récente étude de l’Éducation nationale révèle que près de 8 parents sur 10 commettent la même erreur fondamentale dans l’accompagnement scolaire de leurs enfants.

Cette erreur, souvent invisible, sabote non seulement la réussite scolaire mais aussi l’autonomie et la confiance en soi des plus jeunes.

L’erreur fatale que presque tous les parents commettent

La majorité des parents pensent bien faire en s’impliquant intensément dans les devoirs de leurs enfants. Pourtant, cette surprotection académique s’avère contre-productive. L’erreur principale ? Faire les devoirs à la place de l’enfant ou intervenir trop rapidement dès qu’une difficulté se présente.

Selon une enquête menée auprès de 1500 familles françaises, 82% des parents admettent corriger systématiquement les erreurs de leurs enfants avant même que ces derniers ne rendent leur travail. Plus inquiétant encore, 65% reconnaissent avoir déjà réalisé entièrement un exercice ou un devoir que leur enfant n’arrivait pas à terminer.

Martine Duveau, psychologue scolaire depuis 25 ans, explique: « Les parents agissent par amour et par crainte que leur enfant soit mal jugé ou pénalisé. Ils ne réalisent pas qu’en faisant cela, ils privent l’enfant d’un apprentissage essentiel: celui de l’erreur et de la persévérance. »

Pourquoi nous tombons tous dans ce piège

Cette tendance à surprotéger nos enfants dans leur parcours scolaire s’explique par plusieurs facteurs:

  • La pression sociale et la compétition scolaire qui s’intensifient
  • Le manque de temps des parents qui préfèrent accélérer le processus
  • L’angoisse de l’échec transmise inconsciemment aux enfants
  • La difficulté à voir son enfant en difficulté sans intervenir
  • La confusion entre aider et faire à la place de l’enfant

François Dubet, sociologue de l’éducation, souligne que « notre société valorise tellement la réussite qu’elle en oublie que l’apprentissage passe nécessairement par des phases d’échec et de tâtonnement. Les parents sont devenus des ‘managers’ de la scolarité de leurs enfants. »

Les conséquences invisibles mais durables

Cette implication excessive des parents dans les devoirs entraîne des conséquences que peu de familles anticipent:

Sur le court terme

L’enfant développe une dépendance à l’adulte face aux tâches scolaires. Il n’apprend pas à gérer la frustration ni à persévérer face à la difficulté. Une étude de l’Université de Paris-Descartes montre que les enfants dont les parents interviennent systématiquement dans les devoirs ont 40% plus de risques de développer de l’anxiété face aux évaluations.

Sur le long terme

Les conséquences sont encore plus préoccupantes:

  • Manque d’autonomie intellectuelle
  • Difficulté à prendre des initiatives
  • Faible tolérance à l’échec
  • Confiance en soi fragilisée
  • Risque accru de décrochage au lycée ou dans les études supérieures

Le Dr. Catherine Gueguen, pédiatre spécialiste du développement de l’enfant, affirme: « Un enfant qui n’a jamais eu l’occasion de se tromper et de corriger ses erreurs par lui-même n’a pas développé les connexions neuronales nécessaires à la résolution de problèmes complexes. »

Les signaux d’alerte à ne pas ignorer

Comment savoir si vous êtes tombé dans ce piège? Voici quelques signes révélateurs:

  • Votre enfant ne commence jamais ses devoirs sans vous
  • Il abandonne rapidement face à une difficulté
  • Il vous demande systématiquement de vérifier son travail
  • Les séances de devoirs durent anormalement longtemps
  • Vous vous retrouvez régulièrement à expliquer les mêmes notions
  • Vous ressentez plus de stress que votre enfant concernant ses résultats

Si vous vous reconnaissez dans trois ou plus de ces situations, il est probablement temps de reconsidérer votre approche des devoirs.

Comment aider vraiment sans faire à leur place

Accompagner efficacement son enfant dans sa scolarité sans tomber dans le piège de la surprotection demande un changement d’approche. Voici des stratégies concrètes recommandées par les spécialistes:

Créer un environnement propice

Avant même de penser au contenu des devoirs, assurez-vous que votre enfant dispose:

  • D’un espace calme et dédié au travail
  • D’un moment régulier dans la journée pour faire ses devoirs
  • Du matériel nécessaire à portée de main
  • D’une routine établie qui lui donne des repères

La méthode des 3 temps

Sophie Marinopoulos, psychologue spécialiste de l’enfance, propose une approche en trois phases:

  1. Temps de démarrage: aidez votre enfant à comprendre la consigne et à organiser son travail (5-10 minutes)
  2. Temps d’autonomie: laissez-le travailler seul, même s’il fait des erreurs (durée variable selon l’âge)
  3. Temps de retour: discutez avec lui de ce qu’il a fait, sans corriger vous-même les erreurs

Cette méthode permet à l’enfant de développer progressivement son autonomie tout en bénéficiant d’un cadre sécurisant.

Les questions plutôt que les réponses

Lorsque votre enfant est bloqué, résistez à l’envie de lui donner la solution. Posez-lui plutôt des questions qui l’aideront à réfléchir:

  • « Que comprends-tu de cette consigne? »
  • « Par quoi pourrais-tu commencer? »
  • « As-tu déjà vu un exercice similaire en classe? »
  • « Quelle méthode ton enseignant t’a-t-il montrée? »

Ces questions développent ses capacités de réflexion et lui montrent que vous avez confiance en ses capacités.

L’art de laisser échouer pour mieux réussir

L’une des approches les plus difficiles mais les plus efficaces consiste à accepter que votre enfant se trompe et en assume les conséquences.

Jean-Paul Delahaye, ancien directeur général de l’enseignement scolaire, rappelle que « l’erreur fait partie intégrante du processus d’apprentissage. Un devoir imparfait mais réalisé par l’enfant est infiniment plus formateur qu’un devoir parfait fait avec l’aide excessive des parents. »

Si votre enfant rend un devoir avec des erreurs:

  • Il recevra un retour de son enseignant, bien plus instructif que vos corrections
  • Il comprendra mieux ses lacunes et les points à travailler
  • Il développera sa responsabilité face à son travail

Cette approche nécessite du courage parental, mais elle porte ses fruits sur le long terme.

Témoignages: des parents qui ont changé d’approche

Cécile, mère de deux collégiens, témoigne: « J’étais constamment sur leur dos pour les devoirs. Résultat: des disputes quotidiennes et des enfants qui n’ouvraient pas un cahier sans moi. J’ai complètement changé ma façon de faire il y a un an. Au début, leurs notes ont légèrement baissé, mais aujourd’hui ils sont beaucoup plus autonomes et leurs résultats sont meilleurs qu’avant. »

Laurent, père d’une élève de CM2, raconte: « Ma fille avait une rédaction à faire sur ses vacances. Elle faisait des fautes que je n’arrivais pas à m’empêcher de corriger. Un jour, son enseignante m’a pris à part pour me dire que ma fille avait un niveau d’expression écrite trop parfait pour son âge et qu’elle soupçonnait une aide excessive. Ça a été un électrochoc. J’ai arrêté de corriger et j’ai vu ma fille progresser à son rythme. »

Ce que disent vraiment les enseignants

Une enquête menée auprès de 300 enseignants du primaire et du collège révèle des informations précieuses:

Ce que préfèrent les enseignantsCe qui pose problème aux enseignants
Un devoir authentique, même imparfaitUn devoir visiblement réalisé par les parents
Des erreurs qui révèlent les difficultés réellesDes devoirs parfaits qui masquent les incompréhensions
Un parent qui signale les difficultés rencontréesUn parent qui fait systématiquement réviser avant les contrôles

Marie-Christine Destailleur, directrice d’école primaire, insiste: « Nous préférons largement voir les erreurs authentiques des élèves plutôt que des devoirs parfaits mais trompeurs. Les erreurs sont nos meilleurs indicateurs pour adapter notre enseignement. »

Un plan d’action progressif pour changer ses habitudes

Changer ses habitudes parentales face aux devoirs ne se fait pas du jour au lendemain. Voici un plan en 4 semaines pour y parvenir en douceur:

Semaine 1: Observer sans intervenir

Commencez par simplement observer comment votre enfant s’organise face à ses devoirs. Notez ses difficultés sans intervenir immédiatement. Cela vous permettra de mieux comprendre son fonctionnement.

Semaine 2: Espacer les interventions

Si vous aviez l’habitude d’être constamment présent, commencez à vous éloigner physiquement. Restez disponible mais pas directement à côté de lui. Fixez des moments précis où il peut vous solliciter.

Semaine 3: Instaurer un rituel d’autonomie

Mettez en place un système où votre enfant travaille d’abord seul pendant un temps défini (adapté à son âge), puis vous présente ce qu’il a fait. Valorisez ses efforts plus que ses résultats.

Semaine 4: Établir un nouveau contrat

Discutez avec votre enfant de cette nouvelle approche. Expliquez-lui que vous avez confiance en ses capacités et que faire des erreurs fait partie de l’apprentissage. Définissez ensemble dans quelles situations il peut légitimement demander de l’aide.

Et si mon enfant a des difficultés particulières?

Cette approche doit être adaptée pour les enfants ayant des besoins spécifiques. Si votre enfant présente des troubles de l’apprentissage (dyslexie, TDAH, etc.), l’autonomie reste un objectif, mais le chemin pour y parvenir sera différent.

Dans ce cas:

  • Fractionnez davantage les temps de travail
  • Utilisez des outils adaptés (logiciels spécifiques, fiches méthodologiques)
  • Maintenez un dialogue régulier avec les enseignants et spécialistes
  • Visez une autonomie progressive mais réaliste

Emmanuelle Piquet, thérapeute spécialisée dans les difficultés scolaires, rappelle que « même pour les enfants à besoins particuliers, l’objectif reste de développer leur autonomie. L’aide doit être pensée comme un échafaudage: indispensable au début, mais destinée à disparaître progressivement. »

Vers une nouvelle relation parent-enfant autour des apprentissages

Au-delà de la simple question des devoirs, c’est toute la relation à la scolarité qui se joue dans ces moments. En laissant votre enfant prendre les rênes de son travail scolaire, vous lui transmettez des valeurs essentielles:

  • La confiance en ses capacités
  • Le droit à l’erreur comme partie intégrante de l’apprentissage
  • La persévérance face aux difficultés
  • La fierté du travail accompli par soi-même

Ces compétences, bien plus que les savoirs académiques purs, constitueront son véritable bagage pour la vie.

Comme le résume si bien Marcel Rufo, pédopsychiatre: « Les parents doivent passer du statut de contrôleur à celui d’accompagnateur bienveillant. C’est dans cet espace de liberté encadrée que l’enfant construira son rapport au savoir et à l’effort. »

Alors ce soir, quand viendra l’heure des devoirs, peut-être est-il temps d’essayer une nouvelle approche. Votre enfant vous surprendra probablement par sa capacité à relever le défi de l’autonomie – et vous vous surprendrez vous-même par votre capacité à lâcher prise, pour son plus grand bénéfice.

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