Afficher Masquer le sommaire
- Les carburants de synthèse changent la donne
- Les défis techniques des e-fuels
- L’hydrogène redonne espoir au moteur thermique
- Les biocarburants gagnent en sophistication
- Les innovations dans les biocarburants
- L’amélioration continue des moteurs thermiques
- Les technologies d’optimisation
- Les obstacles persistants du tout électrique
- L’infrastructure de recharge insuffisante
- Le coût réel de la transition électrique
- L’impact environnemental questionné
- Les secteurs où le thermique résistera
Alors que l’Union européenne a fixé l’interdiction de vente des véhicules neufs à moteur thermique pour 2035, nombreux sont ceux qui pensent que cette technologie centenaire va disparaître du jour au lendemain.
Cette vision simpliste ignore la complexité du secteur automobile et les nombreux défis qui attendent la mobilité électrique.
Le moteur à combustion interne, loin d’être un dinosaure technologique, continue d’évoluer et pourrait bien surprendre ses détracteurs.
Les constructeurs automobiles investissent encore massivement dans l’amélioration des moteurs thermiques, développant des technologies qui réduisent drastiquement les émissions polluantes. Ces investissements ne sont pas le fruit du hasard : ils reflètent une réalité économique et technique que beaucoup préfèrent ignorer.
Les carburants de synthèse changent la donne
L’une des révolutions les plus prometteuses concerne les carburants de synthèse ou e-fuels. Ces combustibles, produits à partir d’hydrogène vert et de CO2 capturé dans l’atmosphère, offrent une neutralité carbone théorique. Porsche a inauguré en 2022 sa première usine pilote au Chili, capable de produire 130 000 litres d’e-fuel par an, avec l’objectif d’atteindre 55 millions de litres d’ici 2026.
Cette technologie présente un avantage considérable : elle permet d’utiliser l’infrastructure existante. Les stations-service, les réseaux de distribution et les moteurs actuels peuvent fonctionner avec ces carburants sans modification majeure. Ferrari, Lamborghini et d’autres constructeurs de véhicules de prestige misent sur cette solution pour maintenir leurs modèles iconiques.
Les défis techniques des e-fuels
Malgré leur potentiel, les carburants de synthèse font face à plusieurs obstacles :
- Le coût de production reste élevé, environ 4 à 7 fois supérieur aux carburants fossiles
- Le rendement énergétique global est faible, environ 13% contre 77% pour un véhicule électrique
- La production nécessite d’énormes quantités d’électricité renouvelable
L’hydrogène redonne espoir au moteur thermique
Parallèlement aux e-fuels, l’hydrogène ouvre de nouvelles perspectives pour les moteurs à combustion. Toyota développe activement des moteurs à hydrogène, notamment pour ses véhicules de course. Le constructeur japonais a équipé une Corolla Cross d’un moteur à hydrogène de 1,6 litre turbo pour participer aux 24 Heures du Mans 2023.
Cette approche présente des avantages significatifs par rapport aux piles à combustible :
- Coût de développement réduit en adaptant les moteurs existants
- Maintenance simplifiée pour les mécaniciens formés aux moteurs thermiques
- Conservation du plaisir de conduite avec les vibrations et le son du moteur
BMW teste cette technologie avec son prototype iX5 Hydrogen, qui combine pile à combustible et petit moteur à hydrogène pour certaines applications.
Les biocarburants gagnent en sophistication
Les biocarburants de nouvelle génération représentent une autre voie d’évolution pour le moteur thermique. Contrairement aux premières générations accusées de concurrencer l’alimentation humaine, ces nouveaux carburants utilisent des déchets agricoles, des algues ou des résidus forestiers.
Total Energies investit massivement dans cette filière avec sa raffinerie de La Mède, convertie pour produire du biodiesel à partir d’huiles usagées et de graisses animales. La capacité de production atteint 500 000 tonnes par an.
Les innovations dans les biocarburants
Plusieurs technologies émergentes transforment le secteur :
- Les microalgues : capables de produire jusqu’à 30 fois plus d’huile par hectare que les cultures traditionnelles
- La pyrolyse : conversion thermochimique de biomasse en carburant liquide
- Les carburants cellulosiques : produits à partir de résidus de bois et de paille
L’amélioration continue des moteurs thermiques
Loin de stagner, la technologie des moteurs à combustion continue de progresser. Les constructeurs développent des solutions innovantes pour réduire la consommation et les émissions.
Mazda perfectionne son moteur Skyactiv-X qui combine allumage par compression et par étincelle, réduisant la consommation de 20 à 30%. Infiniti travaille sur son moteur à taux de compression variable VC-Turbo, qui adapte automatiquement la compression selon les conditions de conduite.
Les technologies d’optimisation
Plusieurs innovations révolutionnent le moteur thermique :
- La désactivation de cylindres : GM, Chrysler et Honda utilisent cette technologie pour économiser jusqu’à 15% de carburant
- L’injection directe haute pression : améliore la combustion et réduit les émissions
- La suralimentation électrique : compense le downsizing par un couple disponible immédiatement
- La récupération d’énergie à l’échappement : transforme la chaleur perdue en électricité
Les obstacles persistants du tout électrique
Malgré les investissements colossaux dans l’électrification, plusieurs défis majeurs freinent l’adoption massive des véhicules électriques. Ces obstacles donnent un répit supplémentaire au moteur thermique.
L’autonomie reste problématique pour de nombreux usages. Si les dernières Tesla Model S dépassent les 600 km d’autonomie, la majorité des véhicules électriques grand public plafonnent entre 300 et 400 km. Pour les professionnels effectuant de longs trajets ou les familles partant en vacances, cette limitation pose problème.
L’infrastructure de recharge insuffisante
Le déploiement des bornes de recharge rapide accuse un retard considérable. La France compte environ 100 000 points de charge publics pour 15 millions de véhicules en circulation. L’objectif gouvernemental de 400 000 bornes d’ici 2030 semble ambitieux au regard du rythme actuel d’installation.
Les zones rurales restent particulièrement défavorisées, créant une fracture territoriale dans l’accès à la mobilité électrique.
Le coût réel de la transition électrique
Au-delà du prix d’achat des véhicules, la transition électrique génère des coûts cachés considérables. Le remplacement des batteries, estimé entre 8 000 et 15 000 euros selon les modèles, représente un investissement majeur après 8 à 10 ans d’utilisation.
L’adaptation du réseau électrique nécessite des investissements pharaoniques. RTE estime à 100 milliards d’euros les investissements nécessaires pour adapter le réseau français à l’électrification massive du transport d’ici 2050.
L’impact environnemental questionné
L’extraction des métaux rares pour les batteries soulève des questions environnementales et géopolitiques. Le lithium, le cobalt et les terres rares proviennent majoritairement de pays instables politiquement, créant une nouvelle dépendance énergétique.
Une étude de l’ADEME révèle qu’un véhicule électrique doit parcourir entre 30 000 et 40 000 km pour compenser l’impact carbone de la production de sa batterie, selon le mix énergétique du pays.
Les secteurs où le thermique résistera
Certains segments du marché automobile resteront longtemps dépendants du moteur thermique. Le transport routier de marchandises peine à trouver des alternatives électriques viables pour les longues distances. Les batteries nécessaires pèseraient plusieurs tonnes, réduisant significativement la charge utile.
L’agriculture et les travaux publics utilisent des machines nécessitant une grande autonomie et une puissance importante. Les moissonneuses-batteuses, les tracteurs de forte puissance et les engins de chantier resteront probablement thermiques pendant des décennies.
Le secteur maritime et l’aviation explorent les carburants de synthèse et l’hydrogène comme alternatives au pétrole, maintenant la pertinence des moteurs à combustion dans ces domaines.
La réglementation européenne de 2035 ne concerne que les véhicules particuliers neufs. Les véhicules d’occasion continueront de circuler pendant au moins 15 à 20 ans supplémentaires, maintenant un marché important pour les carburants alternatifs et les pièces détachées.
Face à ces réalités techniques et économiques, le moteur thermique dispose encore de nombreux atouts. Son évolution vers des carburants propres et des technologies plus efficaces pourrait bien lui offrir une seconde jeunesse, loin de l’image de technologie obsolète qu’on lui attribue trop souvent.