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- La coriandre : une épice qui ne laisse personne indifférent
- Une question de gènes : le rôle crucial de l’OR6A2
- Une répartition géographique inégale
- L’influence de la culture culinaire
- La génétique à l’œuvre : le cas des jumeaux
- Peut-on changer d’avis sur la coriandre ?
- Les stratégies d’évitement
- Au-delà de la coriandre : d’autres aliments clivants
- L’avenir de la recherche sur les préférences gustatives
La coriandre, cette herbe aromatique aux feuilles dentelées, suscite des réactions passionnées.
Adorée par certains, elle est honnie par d’autres qui la comparent à du savon ou à des punaises écrasées.
Ce phénomène fascinant intrigue les chercheurs depuis des années.
Découvrons les secrets de cette plante controversée et découvrons pourquoi elle divise tant les papilles.
La coriandre : une épice qui ne laisse personne indifférent
Également connue sous les noms de persil arabe ou persil chinois, la coriandre est un ingrédient incontournable de nombreuses cuisines à travers le monde. Pourtant, son goût particulier ne fait pas l’unanimité, loin de là. En Europe, environ 17% des personnes affirment détester cette herbe, la décrivant avec des termes peu flatteurs comme « savonneux », « chimique » ou encore « nauséabond ».
Cette aversion n’est pas nouvelle. L’histoire de la coriandre remonte à l’Antiquité, où son nom grec « koriandron » signifiait déjà « punaise mâle », en référence à l’odeur peu engageante de ses feuilles fraîchement froissées. Mais comment expliquer qu’une herbe si répandue dans certaines cuisines puisse provoquer un tel dégoût chez certains ?
Une question de gènes : le rôle crucial de l’OR6A2
La réponse à cette énigme gustative se trouve dans nos gènes. Des recherches scientifiques ont mis en lumière le rôle prépondérant d’un gène spécifique : l’OR6A2. Ce gène, présent chez tous les êtres humains, joue un rôle clé dans la perception des odeurs et des saveurs.
Une étude menée par l’université de Mountain View en Californie sur plus de 14 000 participants a révélé que les personnes ayant une version particulière de ce gène sont plus susceptibles de percevoir un goût désagréable en consommant de la coriandre. Concrètement, voici comment cela fonctionne :
- Le gène OR6A2 contrôle la sensibilité de nos récepteurs olfactifs et gustatifs à certaines molécules appelées aldéhydes.
- La coriandre contient naturellement des aldéhydes, notamment l’aldéhyde C12 laurique.
- Cette même molécule est présente dans certains produits d’hygiène comme les savons, gels douches et shampoings.
- Les personnes ayant une surexpression du gène OR6A2 sont particulièrement sensibles à ces aldéhydes.
- Résultat : pour ces individus, manger de la coriandre revient à goûter du savon !
Une répartition géographique inégale
L’aversion pour la coriandre n’est pas uniformément répartie à travers le monde. Une étude canadienne menée en 2012 a mis en évidence des disparités frappantes selon les régions :
Région | Pourcentage de personnes n’aimant pas la coriandre |
---|---|
Moyen-Orient | 3% |
Asie du Sud | 7% |
Amérique Latine | 4% |
Asie de l’Est | 21% |
Europe | 17% |
Afrique | 14% |
Ces chiffres révèlent une tendance intéressante : les régions où la coriandre est traditionnellement très utilisée dans la cuisine locale (Moyen-Orient, Asie du Sud, Amérique Latine) présentent des taux d’aversion beaucoup plus faibles que les zones où elle est moins courante.
L’influence de la culture culinaire
Cette répartition géographique soulève une question fascinante : l’exposition régulière à la coriandre pourrait-elle influencer notre perception de son goût ? Plusieurs facteurs entrent en jeu :
- L’habitude gustative : Dans les pays où la coriandre est omniprésente (cuisine thaïlandaise, indienne, mexicaine…), les papilles s’y habituent dès le plus jeune âge.
- L’association positive : Lorsque la coriandre est associée à des plats appréciés et à des moments conviviaux, le cerveau peut développer une affinité pour son goût.
- L’adaptation génétique : Il est possible que, sur plusieurs générations, les populations consommant régulièrement de la coriandre aient développé une moindre sensibilité aux aldéhydes responsables du goût savonneux.
Ces hypothèses expliqueraient pourquoi seulement 3% des Moyen-Orientaux détestent la coriandre, contre 21% des Asiatiques de l’Est où elle est moins présente dans la cuisine traditionnelle.
La génétique à l’œuvre : le cas des jumeaux
Pour confirmer l’importance du facteur génétique dans l’aversion pour la coriandre, des chercheurs se sont penchés sur le cas particulier des jumeaux. Une étude publiée dans la revue Chemical Senses en 2012 a révélé des résultats éloquents :
- 80% des vrais jumeaux (partageant 100% de leur ADN) ont le même avis sur la coriandre.
- Ce taux est nettement inférieur chez les faux jumeaux (qui ne partagent que 50% de leur ADN).
Ces observations renforcent l’hypothèse d’une forte influence génétique dans notre perception de la coriandre. Cependant, elles montrent aussi que d’autres facteurs entrent en jeu, puisque même chez les vrais jumeaux, l’accord n’est pas total.
Peut-on changer d’avis sur la coriandre ?
Si vous faites partie des 10% de la population mondiale qui perçoit un goût de savon en mangeant de la coriandre, tout espoir n’est pas perdu. Bien que l’aversion soit généralement permanente, certains témoignages suggèrent qu’il est possible de modifier sa perception au fil du temps.
Voici quelques pistes pour tenter d’apprivoiser la coriandre :
- L’exposition progressive : Commencez par de très petites quantités mélangées à d’autres aliments que vous appréciez.
- La préparation : Certaines personnes trouvent que la coriandre est plus agréable lorsqu’elle est hachée finement ou cuite légèrement.
- L’association : Essayez la coriandre dans des plats où son goût est équilibré par d’autres saveurs fortes (épices, agrumes…).
- La patience : N’hésitez pas à retester la coriandre de temps en temps. Votre perception pourrait évoluer avec l’âge ou suite à des changements physiologiques.
Il est intéressant de noter que certains traitements médicaux, comme la radiothérapie, peuvent modifier temporairement ou durablement notre perception des goûts. Ainsi, des personnes ayant toujours détesté la coriandre ont parfois rapporté un changement d’opinion après de tels traitements.
Les stratégies d’évitement
Face à l’omniprésence de la coriandre dans certaines cuisines, les personnes qui la détestent développent parfois des stratégies d’évitement créatives :
- Prétendre une allergie à la coriandre pour s’assurer qu’elle ne soit pas ajoutée à leur plat.
- Demander systématiquement la composition des plats dans les restaurants exotiques.
- Apprendre à reconnaître visuellement la coriandre pour pouvoir l’écarter discrètement.
- Opter pour des versions « sans coriandre » de certains plats traditionnels.
Ces tactiques témoignent de l’intensité du dégoût ressenti par certains face à cette herbe pourtant anodine pour d’autres.
Au-delà de la coriandre : d’autres aliments clivants
La coriandre n’est pas le seul aliment à diviser aussi radicalement les opinions. D’autres exemples de nourriture « clivante » incluent :
- Le durian, un fruit asiatique à l’odeur si forte qu’il est interdit dans certains lieux publics.
- La réglisse, adorée par certains, détestée par d’autres pour son goût anisé prononcé.
- Les huîtres, considérées comme un met délicat ou repoussant selon les personnes.
- Le natto, ces graines de soja fermentées typiques de la cuisine japonaise, à la texture gluante.
Ces exemples montrent que nos préférences alimentaires sont le résultat d’un mélange complexe entre génétique, culture et expériences personnelles.
L’avenir de la recherche sur les préférences gustatives
Les découvertes sur le lien entre génétique et perception de la coriandre ouvrent la voie à de passionnantes perspectives de recherche. Les scientifiques s’intéressent désormais à d’autres aliments controversés, cherchant à comprendre les mécanismes génétiques et neurologiques qui sous-tendent nos préférences gustatives.
Ces travaux pourraient avoir des applications concrètes dans divers domaines :
- La nutrition personnalisée, avec des régimes adaptés à notre profil génétique.
- L’industrie alimentaire, pour développer des produits ciblant des groupes spécifiques de consommateurs.
- La médecine, pour mieux comprendre et traiter certains troubles du goût et de l’odorat.
Qui sait ? Peut-être qu’un jour, un test ADN pourra prédire si vous allez adorer ou détester la coriandre avant même d’y avoir goûté !
En attendant, que vous soyez un fervent amateur de coriandre ou que vous la fuyiez comme la peste, rappelez-vous que votre perception est unique et valable. Après tout, la diversité des goûts fait la richesse de la gastronomie mondiale. Et si la coriandre reste votre bête noire culinaire, consolez-vous : il vous reste des milliers d’autres saveurs à explorer et apprécier !