Blocage de sites pornos en France : Xhamster et Tukif dans le viseur de la justice

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La France frappe fort contre les sites pornographiques.

Depuis hier, les internautes français ont eu la surprise de découvrir que certains de leurs sites adultes préférés étaient devenus inaccessibles.

Une décision de justice vient en effet de tomber, ordonnant le blocage de plusieurs plateformes X majeures, dont Xhamster et Tukif. Mais que se passe-t-il exactement ? Pourquoi ces sites sont-ils visés ? Et surtout, est-ce vraiment efficace ?

La justice française sévit contre les sites pornos

Le 15 novembre 2024, Orange, le plus gros fournisseur d’accès internet en France, a commencé à bloquer l’accès à plusieurs sites pornographiques populaires. Cette mesure fait suite à un arrêt de la cour d’appel de Paris rendu le mois dernier, le 17 octobre.

Les sites concernés par ce blocage sont :

  • Xhamster
  • Tukif
  • Iciporno
  • MrSexe

Ces plateformes sont accusées de ne pas respecter la législation française sur la vérification de l’âge des utilisateurs. En effet, une loi votée en 2020 impose aux sites pornographiques de mettre en place des systèmes efficaces pour empêcher l’accès des mineurs à leurs contenus.

Pourquoi ces sites en particulier ?

La raison principale pour laquelle ces sites ont été ciblés en premier est leur localisation. Contrairement à d’autres géants du porno comme Pornhub ou Xvideos, Xhamster et consorts ne sont pas basés dans l’Union européenne. Cette situation a facilité la décision de blocage par la justice française.

Les sites hébergés dans l’UE, comme Pornhub, Youporn ou Xvideos, bénéficient pour l’instant d’un sursis. Leurs avocats arguent que les lois des pays européens où ils sont basés (Chypre et République Tchèque notamment) doivent prévaloir sur la législation française. Cette question épineuse a d’ailleurs été renvoyée devant la Cour de justice de l’Union européenne pour arbitrage.

Comment le blocage est-il mis en place ?

Le blocage est principalement effectué via une méthode appelée « blocage DNS » par les quatre grands fournisseurs d’accès à internet français :

  • Orange
  • Free
  • SFR
  • Bouygues Telecom

Cependant, il convient de souligner que ce blocage n’est pas infaillible. Certains fournisseurs alternatifs comme Starlink ou MilkyWan n’appliquent pas encore ces restrictions. De plus, les utilisateurs un peu avertis peuvent facilement contourner le blocage en utilisant des serveurs DNS alternatifs, comme ceux de Google par exemple.

La protection des mineurs au cœur du débat

Cette décision de justice s’inscrit dans un contexte plus large de protection de la jeunesse face aux contenus pornographiques en ligne. Selon une étude menée par l’Arcom (Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique), 40% des adolescents âgés de 12 à 17 ans visitent des sites pornographiques chaque mois. Un chiffre alarmant qui justifie, selon les autorités, des mesures drastiques.

Justine Atlan, directrice générale de l’association e-Enfance, s’est d’ailleurs félicitée de cette décision : « Notre combat est avant tout pour la protection de l’enfance. Ces mesures étaient nécessaires face à l’ampleur du phénomène. »

Quelles solutions pour vérifier l’âge ?

L’Arcom a publié le 11 octobre dernier un référentiel technique auquel les sites pornographiques doivent se conformer dans un délai de trois mois. Parmi les solutions proposées :

  • L’envoi d’un document d’identité
  • Un selfie vidéo
  • Une vérification par carte bancaire (solution temporaire)

Ces vérifications devraient être réalisées par des entreprises tierces pour garantir la confidentialité des données personnelles. Cependant, la méthode de la carte bancaire soulève des inquiétudes. La Fédération bancaire française a notamment critiqué cette approche, la jugeant inefficace et potentiellement dangereuse en raison des risques d’hameçonnage.

Les sites bloqués réagissent

Face à cette situation, les sites concernés adoptent différentes stratégies :

  • MrSexe a choisi de bloquer lui-même l’accès aux utilisateurs français, invoquant l’absence de solutions techniques fiables et économiquement viables pour vérifier l’âge des internautes.
  • D’autres sites tentent de contourner les restrictions en utilisant des sous-domaines locaux non bloqués pour rediriger les utilisateurs vers des URL accessibles.
  • Certains envisagent de se conformer à la législation française pour pouvoir être réautorisés.
  • D’autres encore pourraient simplement se retirer du marché français ou encourager l’utilisation de techniques comme les VPN pour contourner le blocage.

Un débat qui divise

Cette affaire soulève de nombreuses questions et divise l’opinion. D’un côté, les associations de protection de l’enfance comme La Voix de l’enfant et e-Enfance saluent ces mesures qu’elles jugent nécessaires. De l’autre, certains s’inquiètent des atteintes potentielles à la liberté d’expression et au droit à la vie privée.

Frédéric Benoist, avocat des associations La Voix de l’enfant et e-Enfance, a notamment critiqué l’influence du lobby de l’industrie pornographique dans ce dossier, estimant qu’il ralentissait la mise en place de mesures de protection efficaces.

Quid de l’efficacité réelle de ces mesures ?

Si l’intention de protéger les mineurs est louable, l’efficacité réelle de ces mesures de blocage reste à prouver. Les jeunes internautes, souvent plus à l’aise avec la technologie que leurs aînés, pourraient rapidement trouver des moyens de contourner ces restrictions.

De plus, le blocage de quelques sites, même populaires, ne résout pas le problème de fond. Internet regorge de contenus pornographiques sur des plateformes variées, y compris les réseaux sociaux et les sites de streaming.

Vers une régulation européenne ?

L’affaire du blocage de Xhamster et Tukif en France pourrait bien n’être que le début d’un long processus de régulation des contenus pornographiques en ligne. La décision à venir de la Cour de justice de l’Union européenne concernant les sites basés dans l’UE sera cruciale.

Si la CJUE donne raison à la France, cela pourrait ouvrir la voie à une harmonisation des règles au niveau européen, obligeant tous les sites pornographiques à mettre en place des systèmes de vérification d’âge stricts, quel que soit leur pays d’hébergement dans l’UE.

En attendant, le débat reste ouvert : comment concilier protection de l’enfance, liberté d’expression et respect de la vie privée à l’ère du numérique ? La réponse à cette question complexe façonnera sans doute l’internet de demain.

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Rédacteur du site Economie News spécialiste de l'économie, il est passionné par l'économie et les nouvelles technologies. Il publie des actualités liées à l'économie, la finance et les technologies. Il est actuellement Gérant de la société Impact Seo, une agence web basée Aix-En-Provence.

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